Le musée Würth France Erstein, en Alsace, consacre une rétrospective à l’artiste portugais José de Guimarães. Né en 1939, il a grandi à Guimarães – ville à laquelle il a, par la suite, rendu hommage en l’intégrant à son nom d’artiste. Dans les années 1950, il se rend à Lisbonne pour y suivre des études d’ingénieur et s’initier au dessin, à la peinture et à la gravure. Au cours de la décennie suivante, ses voyages dans le reste de l’Europe, tout particulièrement à Paris, l’introduisent au pop art. En 1967, José de Guimarães est envoyé en Angola comme officier des télécommunications, dans le cadre de la guerre menée par le Portugal contre les indépendantistes.
Son service militaire en Angola s’avère l’élément déclencheur à son œuvre. Il y découvre une culture extrêmement différente de la sienne, disposant d’une tradition orale très riche et de modes de communication qui le fascinent. « Les membres d’une même famille communiquaient grâce aux objets et à des signes gravés qui leur permettaient de raconter des histoires – souvent des proverbes », évoque-t-il. Cela lui inspire la création de son Alphabet africain (1971-1974) : cent trente-deux pictogrammes de 50×40 centimètres ayant chacun une signification précise, et qui, une fois combinés ensemble dans ses peintures, forment un autre sens, à la manière de l’alphabet chinois.
« Cela me semblait pouvoir démultiplier, ouvrir les possibilités de l’œuvre d’art. Si l’on utilise, comme les artistes du pop art, des images déjà élaborées, les possibilités d’expressions sont limitées à ces images finies. En construisant mon alphabet, je me laissais la possibilité de créer sans cesse de nouvelles propositions artistiques tout en renouvelant l’ensemble des informations et des significations », explique José de Guimarães. Au fur et à mesure de ses rencontres avec d’autres cultures – notamment mexicaine et chinoise, l’univers pictural de l’artiste n’en sera que plus enrichi. Passionné d’anthropologie, il s’intéressa aux tribus africaines, aux rites aztèques, aux traditions japonaises et chinoises. Il rassembla également une large collection de pièces d’art premier.
Auteur de trois manifestes d’art différents, il a exploré tous les matériaux et supports possibles, de la peinture à la sculpture, du papier aux compositions murales. Désormais, il expérimente avec les néons et les LED, ainsi qu’avec des matériaux recyclés, notamment les boîtes qui transportent ses œuvres d’une exposition à une autre : « elles deviennent, à leur tour, des œuvres d’art et l’idée de voyage dont elles sont imprégnées me touche particulièrement », déclare-t-il.
En effet, sa notoriété a beaucoup fait voyager ses œuvres, tout particulièrement au Japon, qui le sollicite pour de nombreuses œuvres et expositions. Son pays natal lui consacre tout de même deux grandes rétrospectives en 1992 et lui commande l’aménagement de la station Carnide à Lisbonne. Mexico City en fera de même pour deux panneaux muraux en azulejos installés dans une station de métro.
L’exposition « José de Guimaraes : de l’anthropologue à l’artiste » est donc l’occasion de découvrir les œuvres de cet artiste cosmopolite, mis en regard avec les nombreuses pièces qu’il a collectionné tout au long de sa vie et qui l’ont inspiré artistiquement. A voir jusqu’au 15 mars 2020 au Musée Würth France Erstein.
Du 25 janvier au 1er avril 2020 – Frac Haute-Normandie – 3 place des Martyrs-de-la-Résistance – 76300 Sotteville-lès-Rouen
Du mercredi au dimanche de 13h30 à 18h30 sauf jours fériés.
Caroline Gomes
Vues : 258