Le Brésil est le pays d’Amérique latine où le Covid-19 progresse le plus rapidement. Il y a un risque élevé que ce virus se répande dans les 763 favelas de Rio.
Beaucoup d’éléments jouent contre les favelados.
La surpopulation rend difficile l’adoption des mesures recommandées, telles que la distanciation sociale et l’auto-isolement. Ils vivent dans des conditions insalubres. Ils sont souvent sans accès à l’eau courante, ce qui empêche un lavage régulier des mains. Comment s’isoler quand les maisons s’enchevêtrent dans de minuscules ruelles ? Comment ne pas aller travailler quand la nourriture manque dans le frigo ?
Le président du Brésil s’est contenté de minimiser l’épidémie de Covid-19 qu’il a qualifiée de « petite grippe ». Il a durement critiqué les mesures de restriction mises en place dans différents États par les autorités locales, notamment l’État de Rio ou de São Paulo.
Mais sa prise de position n’est pas figée et ce parce que celle-ci divise jusque dans ses rangs, provoquant ainsi son isolement à tel point que le vice-président du Brésil désavoue sa stratégie.
La Cour suprême impose la défaite à Bolsonaro et autorise les États à décider de l’isolement de façon autonome.
Depuis les casserolades (panelaços) contre le président, fréquentes dans les grandes villes, il tente de se montrer plus engagé, mais ses paroles représentent un simple jeu de communication plutôt qu’un véritable engagement. Ses provocations détruisent ses rares efforts, par exemple lorsqu’il affirme le 27 mars que : « Certains vont mourir, j’en suis désolé, mais on n’arrête pas une usine de voitures parce qu’il y a des accidents de la route. », oubliant ainsi que pour que toute économie existe des êtres vivants sont nécessaires.
Ce sont des appels sur les réseaux sociaux dans le cadre du mouvement social « Voix des fenêtres contre Bolsonaro » qui convoque les casserolades.
L’impact du Covid-19 sera plus élevé chez les plus pauvres (ONU-Habitat). Il met au grand jour les lacunes de l’État social brésilien. La crise sanitaire dévoile la crise capitaliste.
À tout cela s’ajoute l’Église évangélique qui ne cesse de se développer au sein des favelas au détriment d’autres cultes tels que le catholicisme ou le candomblé. L’Église pentecôtiste se montre coronasceptique et refuse de fermer ses portes.
Face à la négation du président de la nécessité de mesures sanitaires, des collectifs distribuent des kits d’hygiène aux favelados. Il y a par ailleurs une attitude assez… kafkaïenne adoptée par des gangs imposant la quarantaine aux favelados dans une favela historiquement abandonnée par les pouvoirs publics.
Si cette crise sanitaire provoque une dégénérescence sécuritaire, M. Bolsonaro pourra blâmer les responsables de la quarantaine. Faisant l’apologie de la dictature militaire, il y trouvera une justification pour concentrer tous les pouvoirs.
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