Thierry Peala & Verioca Lherm donneront un concert le 1er février au 360 Paris Music Factory dans le cadre du Festival Au Fil des Voix, un festival qui s’est imposé comme le rendez-vous incontournable des grandes voix du monde entier. En mettant à l’honneur les pratiques vocales et instrumentales du monde, il convie chaque année le public à un voyage musical au travers de nouvelles sonorités venues des quatre coins du globe, à la rencontre de l’altérité culturelle.
Lors de ce festival, Thierry Peala & Verioca Lherm présenteront leur premier album en duo « a Tânia Maria Journey » déjà salué par la compositrice elle-même et ils partageront avec le public leur passion commune pour l’icône du jazz brésilien : la pianiste-chanteuse-compositrice Tânia Maria.
Thierry Peala est reconnu dans le monde du jazz vocal contemporain et Verioca Lherm est l’une des artistes françaises les plus respectées dans l’univers de la musique populaire du Brésil.
Le 1er février, ils partageront la scène avec Edmundo Carneiro, célèbre percussionniste, qui a accompagné Tânia Maria pendant 25 ans.
Il y a quelques jours, Cap Magellan a eu l’opportunité d’interviewer les artistes Thierry Peala & Verioca Lherm :
CAP MAGELLAN : Avant toute chose, parlez-nous de votre parcours. Comment a surgi votre passion pour la musique ?
VERIOCA LHERM : J’ai commencé par le conservatoire en guitare classique à 14 ans et c’est en écoutant, à 18 ans, Tânia Maria par hasard à la télévision que j’ai eu un coup de foudre pour la musique brésilienne. Et Tânia Maria fait partie de ma passion pour la musique brésilienne. Donc, ce projet avec Thierry est très important à cette étape de ma carrière.
THIERRY PEALA : J’ai commencé plutôt d’une manière empirique. J’avais une famille assez musicienne donc il y avait beaucoup de musique à la maison. Je pense que c’est grâce à la station de radio FIP et notamment Jazz à FIP, que j’ai découvert mes premières musiques brésiliennes. J’aimais chanter et improviser sur les morceaux qui passaient avec la radio. J’ai beaucoup appris en écoutant la radio… Plus tard, je suis devenu comédien. Ensuite, j’ai bifurqué très vite vers la musique et j’ai chanté dans des clubs directement. J’ai commencé dans un club qui ne sélectionnait que des serveurs-chanteurs, ce qui était assez rare à cette époque-là, c’étaient des choses qui existaient plutôt aux États-Unis. Ensuite, j’ai fait l’école de jazz du CIM.
CAP MAGELLAN : Vous parliez déjà le portugais lorsque vous avez commencé à chanter ?
THIERRY PEALA : J’aime ces couleurs, cette langue merveilleuse, mais malheureusement, je ne la parle pas. Je peux dire que je l’empreinte au moment où je chante en direct avec Verioca ou avec d’autres musiciens qui jouent de la musique brésilienne. Je comprends ce que je chante, mais malheureusement, je ne la parle pas. Verioca, en revanche, c’est très différent.
VERIOCA LHERM : Au début, je ne la parlais pas non plus. C’est petit à petit que je suis rentré dedans. Je trouve que le portugais du Brésil est une langue très musicale donc je suis rentré petit à petit par la phonétique et puis petit à petit, j’ai commencé à apprendre les lettres. J’ai appris comme ça, de manière empirique aussi, et puis j’ai pris quelques cours quand même. Mais, ça fait un moment maintenant que je suis plongé dedans et que j’arrive à la parler. Pendant très longtemps, j’étais assez embarrassée lorsque je sortais de scène car beaucoup de Brésiliens me disaient : « Ah você vem de onde ? » et je leur disais « Desculpe, je ne comprends pas ce que vous dîtes ». Les Brésiliens, souvent, pensent que je viens du Brésil mais ne savent pas de quel coin.
CAP MAGELLAN : Comment a surgi cette passion pour la musique populaire brésilienne ?
VERIOCA LHERM : C’est à partir de l’écoute de Tania Maria. Pendant l’apprentissage de la guitare classique, j’ai appris des morceaux d’Heitor Villa Lobos, de Dilermando Reis et de João Pernambuco. Ça faisait partie des classiques compositeurs brésiliens qu’on peut apprendre, mais Tania Maria ça a été un choc. Je me suis dit que là, il fallait que m’y mette sérieusement et que je devais apprendre les percussions et la langue. C’est comme ça que j’ai appris le cavaquinho et la guitare etc.
THIERRY PEALA : Moi, la musique brésilienne, je l’ai découverte à la radio. Mon père avait quelques vinyles comme ça de musique de jazz et à certains moments, j’entendais aussi des couleurs de musiques brésiliennes et ça me rendait fou. Et je pense que tout le monde en France avait ce disque de Stan Getz avec João Gilberto que j’ai adoré. Je pense que j’ai absorbé cette musique et quand je suis tombé sur un disque de Tânia Maria qui était un de ses premiers disques produit en Europe qui s’appelle « Mr and Mrs », ce fut une révélation totale. Ce fut une explosion de joie, d’harmonie et d’improvisations. Tânia Maria faisait, tout à coup, le lien entre le jazz que j’aimais tant et tous ces rythmes et cette culture de musique MBP.
CAP MAGELLAN : Petit retour en arrière, vous vous êtes rencontrés en février 2001, dans les coulisses de l’Olympia où Verioca faisait la première partie de Tania Maria. Créé un duo vous a alors paru évident ?
VERIOCA LHERM : Ce jour-là, on s’est juste croisée dans les coulisses, moi je ne savais pas que c’était lui qui devait faire la première partie aussi, je n’étais pas du tout au courant. Ce n’est qu’un peu plus tard, lorsqu’on a commencé à travailler ensemble qu’on s’est rendu compte que pour construire un projet ensemble ça ne pouvait qu’être Tânia Maria.
THIERRY PEALA : On s’est rencontré effectivement dans les coulisses de l’Olympia où finalement tous les deux nous devions faire soit l’un soit l’autre la première partie et pour des raisons de production, c’est Verioca qui a été choisi et donc on a dû évoquer notre amour pour Tânia Maria ce soir-là, mais on s’en est rendu compte de plus en plus quand on s’est côtoyé après pour travailler ensemble. On a réalisé qu’on était totalement passionné tous les deux par cette merveilleuse musicienne. Donc, on a commencé à jouer en duo et dès le début, on a introduit un ou deux morceaux de Tânia et d’autres types de composition, de compositeurs que ce soit Edu Lobo ou Joyce ou Toninho Horta. Moi, j’ai une grande passion pour une autre chanteuse qui s’appelle Leny Andrade, qui est merveilleuse, qui est une grande improvisatrice et qui faisait à sa façon autrement le lien entre le jazz et le Brésil.
VERIOCA LHERM : Leny Andrade a une manière de scater très personnelle et différente des chanteuses américaines.
THIERRY PEALA : Le SCAT se sont des onomatopées qu’on utilise pendant l’improvisation vocale et j’avais remarqué que Vero aimait ça aussi. Ça faisait alors beaucoup de choses en commun même si on ne se connaissait pas à l’époque. D’abord, on a commencé à rajouter un morceau de Tânia, puis deux, puis trois et puis on s’est posé la question d’enregistrer. C’est grâce à Tânia si nous aimons tant la musique brésilienne et donc on a voulu lui rendre hommage à notre façon.
VERIOCA LHERM : Et puis, jusqu’à présent, il n’existe pas d’interprétations de la musique pianistique de Tânia Maria, juste à la guitare et deux voix…
CAP MAGELLAN : Vous vous étiez déjà croisé avant ?
THIERRY PEALA : Oui, une fois. J’ai vu Verioca avec “les grandes gueules”, c’était un super groupe a capella jazz donc oui je, je l’avais déjà repéré et on a dû se saluer comme ça une fois ou deux, mais on ne se connaissait pas.
CAP MAGELLAN : 20 ans après, le 16 avril dernier était publié votre premier album en tant que duo, intitulé « a Tânia Maria Journey », un hommage à l’artiste. Pourquoi avoir choisi cette artiste et pas une autre ?
THIERRY PEALA : C’était une évidence pour nous. Si on devait vraiment se lancer dans un projet autour des musiques brésiliennes, on devait vraiment rendre hommage à ce premier grand grand coup de cœur qu’a été Tânia pour nous. Parce qu’il y a une richesse. Une richesse harmonique et rythmique, donc le terrain de jeux pour nous est formidable et on peut vraiment s’amuser fortement avec ce répertoire. Et aussi, comme on aime beaucoup les improvisations vocales, le fait que ce soit une orchestration juste avec une guitare et éventuellement quelques morceaux avec des percussions, ça nous laissait énormément de place. Donc, on pouvait aussi utiliser cette place pour chanter et faire du SCAT, donc de l’improvisation vocale.
CAP MAGELLAN : Pourquoi ce choix, d’être accompagné par une guitare et non pas par un piano ?
VERIOCA LHERM : Parce-que je suis guitariste. J’ai toujours été guitariste. Au début, je trouvais ça presque impossible. Lorsqu’on choisissait les musiques ensemble, il me parlait de tel ou tel morceau et je lui disais que ce n’était pas du tout pour la guitare et que je n’y arriverai jamais. Mais en réalité si. J’ai dû repiquer à l’oreille tous les morceaux, car il n’y avait pratiquement pas de partitions. Maintenant, ça fait longtemps que je fais ça et je le fais pour beaucoup d’autres compositeurs brésiliens et je trouve ça très intéressant. C’était aussi plus original de jouer une musique destinée au piano avec un autre instrument.
THIERRY PEALA : Il y a beaucoup de vidéos de Tânia Maria sur YouTube et plus on la regarde, plus on l’écoute, plus on redécouvre sa dextérité. Tânia est une superbe compositrice et elle est surtout une pianiste merveilleuse, extraordinaire. Harmoniquement, elle va très très loin et ce qui nous a toujours frappé, c’est qu’elle peut chanter simultanément absolument tout ce qu’elle improvise au piano. C’est exceptionnel ce qu’elle fait. Donc, pour répondre à la guitare, c’est que c’est tellement exceptionnel, pourquoi refaire quelque chose avec un piano ? Quelque part, je trouve qu’on a eu de la chance même de ne pas avoir de piano. C’est une chance que Verioca ait été guitariste parce-que je pense que si ça aurait été fait au piano, je n’aurais pas fait le projet.
CAP MAGELLAN : Pour l’interview au fil des voix, vous avez défini votre musique comme « deux voix, une guitare et festif ». Pouvez-vous m’en dire plus ? Qu’est-ce que cela représente pour vous ?
VERIOCA LHERM : Sur scène, on serra avec Edmundo Carneiro, percussionniste qui a joué pendant 25 ans avec Tânia Maria justement et lui aussi, c’était la bonne personne à aller chercher. Deux voix et une guitare on en a déjà parlé et festif, il se trouve qu’en ayant joué plusieurs fois au New Morning, cette musique donne de l’énergie. Elle donne de la joie et nous ça nous remplit aussi de dynamisme. Par conséquence, les gens sont heureux comme on l’était nous dans le public en écoutant Tânia Maria. Et ça donne envie de chanter. D’ailleurs, on incite les gens à chanter et en général ça se passe bien, même avec les masques (rires).
CAP MAGELLAN : Quel importance a l’improvisation pour votre duo ?
THIERRY PEALA : Je pense que ça a autant d’importance que l’interprétation des thèmes. D’ailleurs, on s’en rend compte chez Tânia Maria elle-même. La place de l’improvisation est tout aussi importante que le fait d’exprimer les thèmes. En plus, ça nous permet comme il n’y a pas de piano, de faire des petites interventions de petites percussions vocales, le SCAT, c’est-à-dire de chanter des notes, mais aussi improviser des rythmes avec la bouche. Ce qui peut donner une forme équivalente de ce qu’elle peut faire au piano.
VERIOCA LHERM : Moi je suis incapable de faire son piano à la guitare. Par contre, avec les deux voix, on gagne en liberté et en improvisation pour essayer d’atteindre la grande liberté pianistique et vocale de Tânia Maria. Je fais une guitare, un peu comme si c’était João Bosco, qui est un très bon rythmicien aussi et après, une fois que j’ai fixé la partie de la guitare, on a tellement l’habitude de chanter ensemble que c’est assez facile, ça vient tout seul.
THIERRY PEALA : Oui, une grande partie des choses qui sont sur le disque, ont été faite sur le moment.
CAP MAGELLAN : Êtes-vous impatient de retrouver votre publique le 1er février ?
THIERRY PEALA : Pas du tout (rires). Très impatient, d’autant plus que tout le monde me dit que l’endroit du 360 Paris Music Factory est un superbe endroit pour la musique et donc ça va être une belle façon de retrouver le public. D’avoir aussi une très belle salle, de faire partie de ce festival qui est un festival de renom et qui fait quand même très attention à ce qu’on parle des artistes et donc de pouvoir mettre la lumière sur notre projet et d’avoir autour de nous, tout un tas de musiciens prestigieux et aventureux, c’est juste incroyable.
VERIOCA LHERM : Malheureusement, on ne pourra pas aller voir tout le monde car il y a beaucoup de programmation et je n’habite pas à Paris, mais j’aurais adoré voir Lucia de Carvalho que j’ai déjà vu deux fois. Elle est incroyable sur scène !
THIERRY PEALA : Peut-être ce festival nous permettra-t-il aussi de proposer ce spectacle à des gens qui nous connaissent un peu moins puisque c’est un festival qui est international, donc qui ouvre aussi sur un autre public. C’est intéressant aussi de pouvoir toucher un public plus large.
CAP MAGELLAN : Quels sont vos projets pour le futur ? Peut-être un deuxième album ?
THIERRY PEALA : (rires) Quelques personnes nous ont déjà demandé la suite. Il y a encore plein d’autres merveilleuses chansons de Tânia Maria. Alors on fera peut-être un autre album “panaché” avec d’autres compositeurs qu’on adore.
VERIOCA LHERM : On a déjà au moins deux titres qu’on joue sur scène et qui ne sont pas sur l’album et avec Edmundo Carneiro, on se dit souvent qu’on pourrait faire telle chanson ou telle autre chanson. Mais dans l’immédiat, ce qui est vital c’est de tourner grâce au répertoire qui a été enregistré sur ce disque. Malheureusement, comme pour pas mal de monde, avec la pandémie on n’a pas eu le loisir de le jouer sur scène.
THIERRY PEALA : Nous avons envie de tourner ce spectacle en France et à l’étranger ou la musique de Tânia est très appréciée. Nous avons des liens en Angleterre, l’Allemagne et le nord de l’Europe mais pourquoi pas aller au Portugal aussi ! (rires)
Ce qui est très important pour nous, c’est que Tânia Maria a beaucoup aimé notre projet, ce qui était inespéré. Elle excelle tellement dans son art notamment pianistique et notre version est très différente. Le fait qu’elle ait beaucoup aimé et nous ait encouragé nous remplit d’énergie. Donc, si on pouvait aller jouer au Brésil, ça serait formidable.
VERIOCA LHERM : En tout cas, ce n’est pas un projet éphémère, c’est un projet qui va durer longtemps. Vu la force et l’amour que reçoit notre musique, on a envie de la défendre encore pendant longtemps.
THIERRY PEALA : Oui et la musique de Tânia Maria est intemporelle.
Infos pratiques :
Concert le 1er février 2022 au 360 Paris Music Factory à 20h30
32 Rue Myrha, 75018 Paris
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