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20 avril 2019En Mars dernier, vous avez sûrement entendu cette voix. Sur The Voice, puis sur les réseaux sociaux, son interprétation de « Lagrima » de Dulce Pontes en a ému plus d’un. Sa prestation très remarquée a donné des frissons à des millions de téléspectateurs. Encore plus à ceux qui connaissent le fado ou qui en écoutent depuis leur tendre enfance.
Mélange de nostalgie et de mélancolie, le fado illustre à lui seul un mot, un sentiment, que personne n’a encore pu traduire véritablement, la « saudade ».
La « saudade », c’est sûrement ce qui a poussé Chloé Esteves, 21 ans, originaire de Montpellier, à chanter et à nous raconter son histoire.
D’un naturel simple et jovial, Chloé a préféré utiliser le tutoiement et s’est livrée sans filtres.
Sur son parcours
Cap Magellan : Tu as tout arrêté, et notamment ton métier de coiffeuse pour ta passion, la musique, quel a été le déclic ?
Chloé : (Rires). J’ai laissé tomber mes études, du jour au lendemain, j’ai dit à ma mère que je voulais faire de la musique. J’étais en mention complémentaire, après mon CAP coiffure. A une pause dans ma journée, je me suis dit « Ce n’est pas du tout ce que je veux faire », j’ai eu le déclic. Je me suis dis qu’il ne fallait pas que je me lève le matin et aller au boulot à reculons.
Cap Magellan : Tu sembles dire que c’est pour démontrer à ta mère que tu pouvais réussir dans ce milieu difficile, c’est bien cela ?
Chloé : Je pense que dans ma tête, c’était déjà fixé. Même si ma mère m’avait dit « non », j’aurais tout fait pour lui faire accepter. Elle m’a laissé une petite chance et pour le coup, j’ai réussi !
Cap Magellan : Avais-tu des plans en tête ? Et comment as-tu commencé la musique ?
Chloé : Je chante depuis toujours. Mes deux parents sont portugais. Du côté de mon père, la musique est ancrée dans la famille, tout le monde chantait beaucoup. J’ai arrêté du jour au lendemain, sans aucun plan en tête mais pour faire ce qui me plaisait.
Cap Magellan : Quelles étaient les musiques les plus chantées avec ton père ?
Chloé : Des vieilles chansons portugaises, du fado etc. Cela fait 14 ans que je ne parle plus portugais. Pendant 14 ans je n’ai plus parlé à mon père. Depuis quelques jours, avec mon aventure sur The Voice, j’ai repris contact avec lui et qu’il me remet dans le bain.
J’ai chanté une chanson qui représentait ma « Vóvó », ma grand-mère, mon père n’avait pas écouté cette chanson depuis son décès et nous avons eu un électrochoc tous les deux, ça a permis de renouer les liens.
Cap Magellan : Quelles relations entretiens-tu avec le Portugal ?
Chloé : Je suis portugaise. Mes racines sont très importantes. J’ai toujours écouté des chansons portugaises. Je savais que c’était en moi, cela me faisait toujours vibrer, cela résonnait naturellement en moi directement. Et à la maison, tout le monde parlait portugais.
Malheureusement, je n’y suis pas retourné depuis 14 ans, mais j’y retourne cet été normalement. Mon père est originaire d’un petit village à côté de Braga.
Cap Magellan : Le fado est-il ton style musical de prédilection ?
Chloé : Pas du tout, ce n’était pas le genre de musiques que je chantais sur scène. C’était vraiment dans mon intimité, je chantais pour moi, comme ça. Mais je n’avais pas la confiance pour reprendre un fado parce que c’était beaucoup trop important pour moi. Quand j’ai chanté du fado pour la première fois à mes amis ils m’ont dit « c’est ça que tu dois chanter ! ».
Je chantais plutôt de la pop, du blues et de la soul, notamment à l’Académie de musique de Nancy qui m’a permis d’évoluer.
Sur sa prestation dans The Voice
Cap Magellan : Pourquoi as-tu choisi cette musique, du fado, « Lágrima » de Dulce Pontes interprétée à l’eurovision 1995 pour représenter le Portugal, à l’heure où la plupart des candidats opte pour des chansons plus populaires et plus connues du grand public ?
Chloé : Ce sont mes racines, mes origines, je voulais que le coach aime cette partie de moi pour « coller ». Je voulais absolument chanter du portugais pour faire The Voice et que les gens s’ouvrent un peu et qu’ils découvrent le fado. C’était une chanson qui me rappelait ma famille, ma grand-mère, et cela résonnait beaucoup en moi.
Cap Magellan : Tu avais l’air très émue face à la standing ovation, qu’est-ce que cela représente pour toi ?
Chloé : C’était fou ! Je n’avais pas l’habitude, je ne m’attendais pas à tant d’émotions et je suis très émotive. J’étais touchée et c’était exactement l’effet que je voulais.
Cap Magellan : Les 4 jurys étaient sous le charme, n’étais-tu pas trop impressionnée face à ces stars de la chanson françaises ?
Chloé : A ce moment-là, je ne savais plus où j’étais. Je me disais « maintenant écoute ce qu’ils vont te dire ». C’est un peu flou et c’était très rapide et très long à la fois dans ma tête. Beaucoup d’émotions se sont mélangées en même temps.
Cap Magellan : Tu as été le sujet de convoitises entre Mika et Soprano, qui se sont battus pour t’avoir dans leur équipe, et Mika a soulevé quelque chose d’intéressant, ce mélange dans ta voix entre le portugais et le français. Ce mélange des deux cultures est-il important pour toi ?
Chloé : Je voulais que l’on retienne ça. Je ne voulais pas non plus que l’on me mette dans une case « elle ne chante que du portugais » ou « que du français » ou de l’anglais. Mika a bien cerné les deux parties.
Cap Magellan : Chose rarissime, ils sont allés jusqu’aux coulisses pour te convaincre, l’avis et la présence de tes proches paraissaient très importants pour toi.
Chloé : Je voulais absolument que ma mère et mon frère aient un électrochoc. Du coup, lorsqu’ils me l’ont proposé j’étais très motivée. Ma mère était très émue.
Cap Magellan : Dans le Talent Room, tu as interprété « Comme un Boomerang » de Serge Gainsbourg, les chansons nostalgiques et de cœurs blessés sont tes chansons de prédilection ?
Chloé : (Rires). C’est vrai, je ne sais pas mais il faut que le texte me touche. C’est vrai que ce ne sont pas des musiques où je cours de partout, mais je sais faire les deux. Je chante aussi beaucoup d’autres choses !
Sur son avenir
Cap Magellan : Comment se passe la suite de ton aventure, sans révéler ce qui se passera samedi soir ?
Chloé : J’ai mis beaucoup de temps à réaliser, je ne pensais pas aller à l’étape suivante. Quand je suis arrivée pour les coachings, j’étais perdue et Soprano m’a beaucoup rassuré, il m’a mis à l’aise même hors caméra. Il a été attentif avec moi.
Cap Magellan : Qu’est ce qui t’as aidé pour faire ton choix entre Soprano et Mika ?
Chloé : Mika m’a dit de magnifique chose, j’en suis encore beaucoup touchée et je ne le remercierai jamais assez. Mais Soprano me faisait penser à moi, il ne trouvait pas ses mots un peu comme moi.
En allant à la Family room il m’a glissé « moi aussi j’ai galéré pour faire de la musique ». On a eu un lien tout de suite, et du coup je suis allé avec lui. Je me suis reconnue par rapport à sa musique et sa personnalité.
Cap Magellan : C’est peut-être précipité de demander ça, mais as-tu déjà des futurs projets ?
Chloé : Pour l’instant je vais m’acheter du matériel pour tourner moi-même. Je veux aussi me remettre au portugais, j’aimerais faire l’année prochaine des dates au Portugal et pouvoir reparler. Et j’en ai envie. Je le lis et je le comprends mais je vais me remettre à l’apprentissage de la langue. Beaucoup de médias portugais ont parlé de moi et j’étais très heureuse. Je vais me remettre au portugais avec mon père.
Cap Magellan : Que peut-on te souhaiter pour la suite ?
Chloé : Que cela marche pour moi en tant qu’artiste franco-portugaise !
Par Diego Venceslau