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1 janvier 2025Fiona French Fadista est une fadiste française vivant à Lisbonne. Elle sera de retour à Paris le 16 janvier prochain à 21h au Kibelé. Cap Magellan a souhaité en savoir plus et elle nous a offert une interview exclusive.
Cap Magellan : Bonjour Fiona, j’espère que tu vas bien. Tu seras à Paris le 16 janvier prochain au Kibelé dans le 10e arrondissement. Connais-tu cette salle ?
Fiona French Fadista : Oui et c’est une salle très intimiste et chaleureuse, qui permet une vraie connexion avec le public, à l’image du Fado que je souhaite chanter et partager.
Cap Magellan : Cette fois, l’entrée est à 20 euros et non sur donation libre. Qu’est-ce que cela change pour toi ?
Fiona French Fadista : J’ai toujours fonctionné en donation, mais c’est vrai que c’est quand même plus sûr. Je travaille avec des guitaristes qui doivent être payés. C’est une manière de changer, de tester un autre modèle. De manière générale, le public vient avec l’idée qu’il soutient le spectacle, donc la donation fonctionne bien. Pour autant, c’est toujours mieux quand les gens prennent des billets, évidemment.
Cap Magellan : Pourquoi es-tu devenue fadiste ? Qu’est-ce qui t’a attiré dans ce champ traditionnel ?
Fiona French Fadista : C’est plus un sentiment qui m’a vraiment percuté lorsque j’ai découvert fado en 2018, la première fois que je suis venue à Lisbonne. Je pense que cela lie plusieurs aspects de mon parcours : le théâtre, la comédie musicale, le chant, la guitare, etc. Cela m’a paru évident. C’est quelque chose qui résonnait en moi. J’ai pensé « si un jour je viens vivre à Lisbonne, j’apprendrais le fado ». A l’époque, ce n’était pas dans mes plans. C’est arrivé en 2020, complètement par hasard. Je travaillais déjà pour une boîte à moitié portugaise. J’étais à Londres et, en 2020, j’ai demandé à bouger. Ils m’ont proposé d’aller au Portugal et j’ai accepté. Je n’avais pas oublié mon défi de me mettre au fado. Une copine m’a emmené dans une Tasca, la célèbre Tasca de Chico. C’est un endroit iconique du quartier de Bairro Alto. J’ai demandé à une fadiste de me donner des cours et elle m’a jetée dans le bain deux ou trois mois après. Petit à petit, j’ai construit mon chemin en allant défier ma peur de chanter dans différents endroits puis je me suis fait peu à peu des contacts dans le milieu.
Cap Magellan : CM : Parles-tu portugais ?
Fiona French Fadista : Je peux maintenant parler et avoir des conversations, mais c’est vraiment le Fado qui m’a permis de progresser. Evidemment, depuis le début, c’est important pour moi de comprendre ce que je chante. Il m’est impossible de chanter du fado sans comprendre ce que je dis et sans ressentir vraiment ce qu’il se passe.
Cap Magellan : Je voulais revenir sur ton nom de scène, Fiona French Fadista. Pourquoi l’avoir choisi en anglais ?
Fiona French Fadista : Je pense que c’est parce que je suis vraiment internationale et mon objectif est de faire connecter les internationaux au fado, ou en tout cas d’être multiculturelle et donc d’être un pont entre les cultures. Il y a aussi le fait de protéger ce champ, ce patrimoine. C’est assez inaccessible. Je souhaite vraiment ouvrir cet univers et apporter plus de communication, d’explication, de mots autour du fado. Évidemment, mon identité française, même si j’ai bougé partout, j’ai vécu à Londres, à Singapour, à Milan, etc., ça a toujours été au cœur de mon identité. J’ai voulu conserver ça. C’est tout de même assez unique. Aujourd’hui, je ne connais pas d’autres fadistas françaises à Lisbonne. C’est une identité qu’on m’a assez vite donnée.
Cap Magellan : Est-ce qu’un jour on aura un album ? Composes-tu ?
Fiona French Fadista : Pour le moment, c’est encore en questionnement. Je me suis plus pliée aux règles, pour comprendre et m’immerger dans le fado traditionnel. Cela reste tout de même un défi permanent d’apprendre les sonorités, la prononciation, le rythme, etc. Je continue de travailler de nouveaux fados toutes les semaines avec des guitaristes, c’est uniquement basé sur ma détermination à progresser. Le fado c’est avant tout l’amour de la répétition. C’est perfectionner les mêmes fados. C’est pour cette raison qu’il n’est pas nécessaire d’avoir un très grand répertoire. Pour autant, j’ai envie d’apprendre toujours plus, de m’y plonger encore. Aujourd’hui, je pense que je crée plus sur l’idée que je connecte des chansons françaises et des chansons portugaises. Je vais pouvoir associer du portugais et du français dans la même chanson, par exemple. Je suis plutôt dans une approche visant à faire résonner des choses entre les Portugais et les Français. Pas que les Français, mais pour montrer que le fado n’est pas forcément que ce que l’on voit. C’est peut-être plus universel que ce que l’on croit. Même si l’essence est très portugaise, elle peut tout à fait être internationale.
J’ai tout de même des enregistrements de fado traditionnels qui vont sortir. C’est pour bientôt !
Cap Magellan : Les deux guitaristes qui t’accompagnent sont ceux qui t’accompagnent aussi à Lisbonne ?
Fiona French Fadista : Non, ce sont des guitaristes qui sont en France depuis longtemps. Manuel Corgas est une pointure de la guitare portugaise. Il m’accompagne depuis plusieurs concerts déjà à Paris. Il est aussi connu à Lisbonne. Joao-Filipe Vira est également très bon, il est plus jeune et né en France.
Cap Magellan : C’est vrai que c’est un milieu quand même assez large finalement, même s’il est opaque.
Fiona French Fadista : Oui, on identifie quand même les gens assez rapidement, surtout en France. C’est plus simple lorsqu’on partage la même passion. Mon objectif est de proposer au-delà du fado traditionnel, pour justement amener les gens à le découvrir mais aussi à le redécouvrir, en les surprenant peut-être.
Cap Magellan : D’ailleurs, tu fais des tech fado diners à Lisbonne, ça c’est surprenant !
Fiona French Fadista : Effectivement, j’ai lancé ce concept, parce que c’est au cœur de mes deux identités. Je viens du milieu de la Tech, de l’innovation et de la 3D, dans le secteur depuis plus de 10 ans déjà. J’ai toujours été une artiste en parallèle. Cette année, cela a pris beaucoup plus d’espace pour moi, le fado et le côté artistique. Lisbonne est aussi une ville très tech. C’est ce qui m’a donné l’idée de créer ces dîners, où l’idée est de faire rencontrer les gens de la tech dans l’univers souvent méconnu du Fado. J’ai toujours aimé ça : repousser les limites et les cloisonnements de ces milieux-là et faire émerger de la valeur, de l’émotion, des rencontres dans des associations qui semblaient impossibles.
Cap Magellan : Pour finir, ma question signature : est-ce que tu aurais un message pour les jeunes lusodescendants ?
Fiona French Fadista : Je serais ravie de les accueillir au concert. Souvent, les Portugais sont déconnectés depuis quelque temps avec le Fado, surtout les jeunes générations, qui le voient comme une musique d’un autre temps. J’aimerais les embarquer sur une autre vision et peut-être leur donner un nouvel éclairage de ce chant, si beau et si puissant, au cœur de leur héritage. Peut-être qu’une approche en miroir de cet art, par une non-Portugaise passionnée et imbibée de la culture lusophone, pourra leur ouvrir de nouvelles perspectives… Je les attends !
Cap Magellan : Merci Fiona ! On se donne donc rendez-vous le 16 janvier !
Nous vous invitons à prendre vos places pour le 16 janvier à 21h au Kibelé.
Vous pouvez également suivre Fiona French Fadista sur ses réseaux sociaux : Instagram, YouTube.
Interview réalisée par Julie Carvalho,
de Os Cadernos da Julie.