Portugal é o primeiro país europeu a receber o selo “Safe Travels”
5 juin 2020À LA UNE AUJOURD’HUI : PORTRAIT DE TIAGO MARTINS
9 juin 2020Pour ce numéro de juin nous vous proposons de la lecture pour l’été et 4 suggestions de livres que nous avons beaucoup aimé ! Un polar avec Le club de Macao, du voyage avec Antonio Tabucchi et Valter Hugo Mãe et des femmes courageuses avec la brésilienne Conceição Evaristo !
Un polar du sud pour l’été
« Il hésite puis fait ce qu’il doit faire. Il se dit que s’achève un chapitre de sa vie et de la vie des autres, mais il est loin d’imaginer que de ces destins qui se croisent, surgiront d’autres horreurs, dans la nuit énigmatique de Macao. » « Extrait du Club de Macao »
Macao, 1986 : un juge – futur procureur-général –, trois policiers, un médecin et un présentateur de télévision créent une maison de passe clandestine de luxe qu’ils nomment le Club de Macao. Ses membres recourent à des adolescentes chinoises prêtes à tout pour pouvoir un jour rejoindre l’Europe. Lorsque l’une d’elle est assassinée le club est dissout. Vingt ans plus tard, à Lisbonne, le désir de candidature du procureur général à l’élection présidentielle rétablit des contacts entre les anciens membres du Club. Son ambition se voit empêchée alors par des scandales qui font surface… Leur mission à tous : éviter à tout prix que les fantômes du passé ne viennent troubler le présent. Pedro Garcia Rosado, auteur de « Mort sur le Tage », propose une enquête complexe et labyrinthique, inspirée par le tristement célèbre procès de pédophilie de la « Casa Pia » au Portugal. Un chassé-croisé fait de désir de vengeance et d’ambitions dévastatrices. Les rebondissements et les faux-semblants sont maîtres dans ce roman noir ayant pour décor Lisbonne et Macao, qui fut territoire portugais pendant plus de 440 ans avant d’être rendu à la Chine en 1999.
Le Club de Macao – Éditions Chandeigne – Traduction du portugais de Myriam Benarroch et de Nathalie Meyroune.
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Pour un voyage aux Açores
Les grands textes littéraires sont un luxe, le véritable luxe ! Avec eux vous voyagez sans bouger … Grâce à une langue faite de suggestions, d’images, à l’intelligence et à la subtilité réjouissante, vous pénétrez grâce au corps du langage (on l’aime dense, corsé comme le vin) dans un autre temps, une autre géographie, une autre vie … C’est le propre des grands textes, vous embarquer dès les premières lignes …
Et pourquoi pas une observation des baleines aux Açores avec l’italien amoureux des lettres portugaises Antonio Tabucchi ?
Le prologue laisse présager des merveilles, des rencontres et des découvertes inoubliables… Du poète insulaire comme Antero de Quental au couple amoureux arpentant les océans du monde. La voix de l’auteur est singulière et humble, une humilité qui renforce aux yeux du lecteur sa grande érudition : « J’ai beaucoup d’affection pour les honnêtes livres de voyage et j’en ai toujours été un lecteur assidu. Ils possèdent la vertu d’offrir un ailleurs théorique et plausible à notre ici inéluctable et pesant. Mais une loyauté élémentaire m’oblige à mettre en garde celui qui s’attendrait ( à quoi?) avec ce petit livre de voyage, genre qui suppose une concomitance d’écriture ou une mémoire imperméable à l’imagination que la mémoire produit – qualité que par un paradoxal sens du réalisme j’ai renoncé à atteindre. Arrivé à un âge où il me paraît plus digne de cultiver des illusions que des velléités, je me suis résigné au destin d’écrire selon mon tempérament. » Dans ces récits de voyages et de naufrages, de chasse à la baleine et d’histoire d’amour contrarié,on retrouve le style poétique de Tabucchi et son penchant pour le rêve et le merveilleux. Lectrices et lecteurs lui disent merci !
« Femme de Porto Pim et autres histoires » d’Antonio Tabucchi – Nouvelle traduction de Bernard Comment
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Mylène
Un cœur glaçé
Dans une Islande aussi belle que sauvage, la jeune Halla, onze ans, est confrontée à une grande tragédie : sa sœur jumelle, Sigridur, meurt brutalement, laissant derrière elle une famille désemparée. Au village, elle devient alors la « moins morte », livrée à sa propre peine et incompréhension et haïe par une mère ne supportant pas la perte de son enfant. Au fil des pages, elle grandira, hantée par l’existence de cette jumelle qui n’est plus, mais qui vit toujours près d’elle, enterrée non loin de la maison familiale. Un double si différent, si plein de joie et de rêves de son vivant, alors que notre héroïne se sent bien vide et isolée. Son histoire puis son mariage avec Einar, un homme que sa sœur lui avait interdit de fréquenter, mais surtout sa grossesse et la naissance de son fils vont lui apporter des instants fulgurants de vie et l’ancrer dans le monde de ceux qui existent.
Digne successeur de José Saramago, Valter Hugo Mãe nous entraîne dans une lande bouleversante et poétique, sur laquelle tombe la violence de la douleur face à la mort d’un être aimé. Sa remarquable plume et les paysages mystérieux de l’Islande subliment la détresse des émotions. Comment vivre quand une partie de soi est sous terre ? Quand l’autre décède, n’est-ce pas mourir soi-même un peu ? Entre Halla et Sigridur, qui représente la vie ou la mort ? Au-delà de la question de la perte et du deuil, Valter Hugo Mãe excelle à révéler toute la fragilité de la condition humaine. La mort nous déshumanise-t-elle en nous privant de ce qui nous est essentiel ou, au contraire, nous rend-elle plus sensible à notre propre humanité ? Qu’est-ce qui est le plus difficile : vivre avec la mort ou bien mourir ?
La Déshumanisation est l’un de ces livres qui marquent longtemps après lecture. A l’instar de Sigridur, ce roman est un magnifique fantôme dont l’intrigue cathartique mérite que l’on y revienne souvent. Véritable alchimiste de la langue, Valter Hugo Mãe parvient, à travers l’incroyable et touchant personnage d’Halla, à dévoiler toute la beauté de la tristesse humaine. Avis aux âmes sensibles, c’est un texte hautement bouleversant qui broie autant qu’il émerveille ! L’ayant lu à sa sortie, en 2013, j’en garde encore un souvenir à vif et c’est avec plaisir que je reçois la nouvelle de sa parution chez Denoël, dans une traduction de Danielle Schramm. Une véritable aurore boréale dans le paysage de la littérature portugaise contemporaine.
La Déshumanisation, Valter Hugo Mãe, éditions Denoël, à paraître en juin 2020.
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De sang et d’eau
Doit-on encore présenter Conceição Evaristo ? Née en 1946 dans une favela de Belo Horizonte, dans le Minas Gerais, elle parvient à terminer sa scolarité tout en aidant à subvenir aux besoins de sa famille. En 1971, elle devient institutrice et s’installe à Rio de Janeiro où elle enseignera pendant près de quarante ans et obtiendra un doctorat en littérature comparée en 2011. Elle est actuellement considérée comme l’un des grands noms de la littérature afro-brésilienne et milite avec verve pour la défense des femmes et de la culture afro-brésilienne. Dans les années 1990, elle publie des nouvelles et des poèmes dans la revue Cadernos Negros. En France, ses romans tels que L’histoire de Poncia et Banzo, mémoires de la favela, ont pu être découverts grâce au travail remarquable des éditions Anacaona, qui œuvre avec brio à la mise en avant de la littérature métissée du Brésil.
En 2019, c’est au tour des Éditions des femmes / Antoinette Fouqué de se pencher sur les talents de Conceição Evaristo en publiant son recueil, Poèmes de la mémoire et autres mouvements, où est dévoilé le concept d’escrevivências ou « écrixistences » : parler d’anecdotes ou histoires vécues, personnelles ou non, pour bâtir et faire connaître une mémoire collective luttant contre les oppressions raciales, genrées ou humaines.
L’on retrouve ces tranches de vie dans le recueil de nouvelles, Ses yeux d’eau, traduit par Izabella Borges. La nouvelle éponyme, qui ouvre l’ouvrage, est une réflexion et un hommage déguisé à sa mère. Des figures maternelles, on en retrouve beaucoup. On découvre surtout une galerie de portraits de femmes en proie à un monde urbain pauvre et hostile. Des êtres à la fois courageux et vulnérables, des héros humbles du quotidien qui révèlent la pluralité et la richesse de la communauté afro-brésilienne. Quinze nouvelles courtes, intenses, sans concessions ni sentimentalismes, où se mêlent la triste banalité du quotidien, le pouvoir rédempteur de la fiction et la prouesse poétique de la plume de Conceição Evaristo. Mention toute particulière à Maria, où l’on assiste à un braquage dans un autobus aux conséquences aussi effarantes que redoutables.
Ses yeux d’eau est résolument un recueil militant, une lecture nécessaire à la lumière des événements actuels au Brésil, un éclairage vivant et salutaire sur ces femmes que l’on entend peu et qui ont tant à dire et à nous apprendre.
Ses yeux d’eau, Conceição Evaristo, Éditions des femmes. Sortie en mars 2020.
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Ana