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12 avril 2019Une rétrospective sur l’œuvre de la plasticienne portugaise Lourdes Castro, intitulée « Ombres & Compagnie », est en cours au Musée régional d’art contemporain Occitanie/Pyrénées Méditerranée (MRAC), à Sérignan, jusqu’au 2 juin.
Lourdes Castro est née à Madère en 1930. Au cours de sa vie, elle a quitté à plusieurs reprises son île natale, avant d’y retourner en 1983. Elle s’est d’abord rendue à Lisbonne pour faire des études à l’Ecole des Beaux-Arts de 1950 à 1956. Par la suite, fuyant le régime de Salazar, elle s’est installée à Paris avec son époux, l’artiste portugais René Bertholo (1935-2005) ; tous deux y sont restés pendant 25 ans. Une bourse de la Fondation Calouste Gulbenkian les a aidé à lancer en 1958 la publication d’une revue artistique, intitulée KWY, fabriquée à la main grâce à la technique de la sérigraphie. Il s’agit d’un projet commun à plusieurs artistes portugais. La revue, tout comme le groupe d’artistes gravitant autour d’elle, est nommée d’après trois lettres qui n’existent pas dans l’alphabet portugais, cherchant à montrer la nécessité de s’ouvrir davantage au monde d’un point de vue artistique et de ne plus en rester strictement à l’environnement culturel portugais. 12 numéros, très différents les uns des autres, ont été publiés à Paris jusqu’en 1964. Durant cette période, le collectif KWY a présenté quatre expositions, dont une à Lisbonne en 1960.
Initialement associée, comme les autres membres du groupe KWY, au mouvement abstrait, l’œuvre de Lourdes Castro a rapidement pris une tournure qui la rapprocha du Nouveau Réalisme de l’époque. Le Nouveau Réalisme est un courant artistique développé dans les années 1960 qui entendait dépeindre le quotidien du 20e siècle, profondément modifié par l’avènement de la consommation et de l’urbanisation, en intégrant à l’art l’esthétique publicitaire, la surabondance d’images, la prolifération de nouveaux matériaux (objets en plastique, voitures, etc.). Le critique Pierre Restany résumait le mouvement comme un « recyclage poétique du réel urbain, industriel, publicitaire ». Chez Lourdes Castro, cette tendance s’exprime notamment dans les matériaux qu’elle utilise pour faire ses œuvres : des objets du quotidien, de l’aluminium, du plexiglass, etc. La série de boîtes qu’elle fabrique contenant un assemblement d’objets divers font ainsi écho à l’esthétique du Nouveau Réalisme, rappelant également les Accumulations du franco-américain Arman ou bien les « boîtes » de l’américain Joseph Cornell.
Le fil rouge de l’œuvre de Lourdes Castro, et donc de la rétrospective que le MRAC lui consacre, est un travail sur les ombres, qu’elle perçoit comme la matérialisation et la capture en négatif d’une présence éphémère. Elle commence par tracer les ombres de ses proches puis des personnalités artistiques et intellectuelles de son temps, produisant ainsi une série de portraits-silhouettes appelée « Sombras projectadas » (Ombres projetées). Plus tard, elle produit des « Sombras deitadas » (Ombres couchées) : inspirée par les brodeuses de Madère, elle coud le tracé de silhouettes couchées sur des draps qui sont ensuite suspendus, de façon à flotter et à prendre vie. Dans les années 1970, elle explore le thème via le médium du théâtre : elle se met en scène avec l’artiste portugais Manuel Zimbro dans un spectacle intitulé « Le Théâtre d’ombres », en train d’effectuer des gestes et des tâches répétitives, traditionnellement dévolues aux femmes, les sortant ainsi en quelque sorte de l’ombre. En 1972, elle produit également un Grand Herbier d’Ombres (Grande Herbário de Sombras), travail scientifique et poétique qui rassemble les ombres d’une centaine d’espèces botaniques se trouvant sur l’Ile de Madère.
Découvez les œuvres de Lourdes Castro jusqu’au 2 juin
Musée régional d’art contemporain Occitanie/Pyrénées Méditerranée
146 avenue de la plage – 34410 Sérignan
Caroline Gomes – capmag@capmagellan.org