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31 mars 2021Ballade pour Sophie: a obra mais íntima do duo Melo e Cavia!
2 avril 2021À l’occasion de la sortie de son album « Sempre mais forte » le 8 mars 2021 pendant la Journée Internationale des Droits des Femmes, Pedro Alves a collaboré avec l’APAV, une association portugaise de soutien aux victimes de violence. Une collaboration visant à reverser l’intégralité des recettes de l’album à l’association. En tout, Pedro Alves espère pouvoir reverser plus de cinquante mille euros à l’association et sensibiliser les personnes à cette problématique.
Cap Magellan: Peux-tu te présenter à nos lecteurs ?
Pedro Alves: Je suis Pedro Alves, j’ai commencé en tant que chanteur et depuis, par la force des rencontres, des envies et des passions, j’ai rajouté des cordes à mon arc. Je suis donc en plus de chanteur, auteur-compositeur, producteur et j’ai également écrit un roman. Je vous rassure, c’est rarement tout en même temps :rire:
CM: Qu’est-ce qui te pousse à faire autant de choses ?
PA: Je dirais que c’est mon envie d’indépendance qui me pousse à prendre en main au maximum mes projets. Gérer des équipes et mettre en place des projets artistiques, c’est ce qui me plait. Tout ce que je fais en tant qu’artiste, c’est pour un public ou pour un objectif qui ne se rapporte pas uniquement à moi. Pour le CAPMag par exemple, on sent que vous ne comptez pas vos heures et que votre volonté, c’est que ce soit fluide, cohérent et intéressant. C’est à peu près la même recette pour moi.
CM: Quel est ton lien avec la lusophonie ?
PA: Je suis né en France de parents portugais. J’ai été élevé dans une France qui n’est pas celle d’aujourd’hui où on prône l’ouverture, avec une grande mixité sociale. Dans les années 70, c’était quand même encore une France cloisonnée et complètement assumée là-dedans. C’est d’ailleurs à cette époque-là que sont nées les grandes banlieues où l’on cloisonnait les gens. À l’époque, il y avait encore des camps portugais au nord de Paris. C’est les mêmes camps qu’on veut vider aujourd’hui, sauf qu’avant, c’était pas des roms, c’était des portugais. J’ai donc vécu en France, mais dans une communauté portugaise. J’ai appris à parler portugais avant le français et mes premiers souvenirs dans la culture française commencent quand j’entre à l’école maternelle. C’est là que j’ai vraiment été confronté à une autre culture, j’ai donc appris au bout de trois ans que je “vivais” en France. Mais aussi d’une deuxième façon: par la moquerie à l’école, car on m’appelait « le sale portugais ».
CM: Quel est ton rapport avec cette double culture ?
PA: J’ai commencé à avoir cette double culture quand j’ai commencé à avoir mes propres goûts musicaux et littéraires. Quand j’ai commencé à écouter Mickael Jackson et Johnny Hallyday plus que Roberto Leal et José Malhoa. Ça n’a pas été évident tout de suite parce que j’étais habitué à réfléchir en portugais et qu’à l’école, j’étais « le portugais ». C’est drôle en y repensant parce que quand j’allais au Portugal j’étais « le français ». On est ni français en France ni portugais au Portugal :rire:
On est des enfants d’immigrés et j’ai l’impression que même les gens au Portugal n’ont jamais réellement pris conscience de ce que cela impliquait. J’aimerais tellement que les portugais soient fiers des immigrés autant que nous sommes fiers de notre pays.
CM: Comment t’es venue l’envie de chanter ?
PA: J’ai commencé à chanter lors de la communion de mon frère, j’étais quelqu’un de très réservé à l’époque. Pendant ma représentation, personne ne parlait et la moitié de la salle pleurait. D’un coup dans les yeux de toute la salle, j’étais un chanteur. Je n’étais plus seulement “le portugais”, non pas que j’avais honte de l’être, mais j’avais l’impression d’être réduit au portugais avec toutes les blagues rattachées à notre communauté comme « ma mère fait le ménage » ou « tu veux faire maçon ou carreleur ». Cette image véhiculée par la société de l’époque et même encore aujourd’hui je ne voulais plus y être rattaché. Finalement ce jour-là je me suis donc aperçu que je pouvais être autre chose. Cela m’a permis de découvrir le mode d’expression qui allait me correspondre.
CM: Peux-tu nous parler de ton nouvel album “Sempre Mais Forte” ?
PA: L’album « Sempre Mais Forte » j’ai voulu le construire, car je suis quelqu’un d’assez cérébrale et je ne fais pas de la musique pour faire de la musique. J’aime que tout soit justifié, car je suis perfectionniste. Dans un premier temps, j’ai analysé le marché portugais et je me suis rendu compte qu’il est unique au monde. En France le top 50 en février, c’est le même que celui d’août, il y a la même cohérence. Au Portugal, au mois de février, la population écoute Rui Veloso et Calema et au mois d’août on voit revenir au top 50 des artistes de musique populaire, comme Tony Carreira ou José Malhoa. Il y a un marché à deux vitesses suivant la proportion d’immigrés qu’il y a dans le pays. Bien entendu, il y a des exceptions. C’est à partir de cette analyse que j’ai commencé à me questionner sur le public cible. Est-ce qu’on va s’adresser aux portugais ou aux immigrés portugais ? Je n’ai pas spécialement voulu faire de choix. Ensuite, j’ai choisi de partir sur des textes plus poétiques et aboutis que les chansons populaires, un peu comme les textes de Mariza ou Paulo Gonzo. J’ai voulu faire quelque chose de plutôt positif avec de bons textes et musicalement me démarquer avec des sonorités peu entendues au Portugal. C’est à ce moment là que je suis parti puiser dans mes racines françaises. Finalement l’album s’est construit en cherchant à faire ce qui me ressemble.
CM: Pourquoi avoir choisi de faire un album en portugais ?
PA: Le chemin portugais s’est dessiné comme un retour aux racines. J’aime cette culture et les émotions que ça me procure. Ce n’est pas du tout pour conquérir un public plus portugais parce que finalement si c’était ça j’aurais surement mieux fait, stratégiquement, de penser à un public français étant donné que le marché français de la musique fait partie du top 5 dans le monde. J’ai donc préféré un marché plus petit, mais plus en rapport avec moi-même et ce qui me plait. Comme on dit : “On n’enlève pas les rayures d’un zèbre”. J’ai l’impression que pendant longtemps j’ai cherché l’animal que j’étais alors que c’était déjà marqué au fond de moi. Comme l’alchimiste de Paulo Coelho qui cherche quelque chose qu’il a dans la main.
CM: Comment t’es venu l’idée de lier ton album à la lutte contre les violences conjugales ?
PA: Je suis tombé sur des reportages qui montraient des scènes de vie pendant le confinement notamment sur les femmes et les enfants victimes de violences conjugales. J’ai eu le sentiment qu’il fallait agir, que je ne pouvais pas simplement regarder sans rien faire. J’ai commencé à regarder les associations portugaises étant donné que l’album était destiné au Portugal avant tout. C’est donc comme ça que j’ai eu l’idée de m’associer à l’APAV, une association portugaise qui vient en aide aux victimes de violence. Par la suite, on a créé une société là-bas pour que tout le chiffre d’affaires y reste.
CM: Justement, comment es-tu entré en contact avec l’APAV ?
PA: J’ai cherché sur internet “association aide aux victimes” et je suis tout de suite tombé sur l’APAV. C’est une association qui a plus de 30 ans, elle est très connue et aussi solide que les restaurants du cœur en France par exemple. Je les ai contactés, mais c’était assez difficile parce que justement ils veulent éviter les faux dons et les fausses œuvres qui vont se servir de la cause pour détourner de l’argent. D’ailleurs quand on les contacte on a directement affaire à leur service juridique. On est tout de suite face à des avocats, à des contrats qui prouvent que c’est du solide. Ils ont accès à la comptabilité, aux comptes bancaires et on doit leur faire un point tous les mois. L’argent récolté pourra les aider à continuer d’acheter des lieux de vie pour que les victimes de violences puissent fuir et avoir un endroit où aller. On ne peut pas juste compter les morts. Ce n’est pas qu’un combat qui doit être assumé uniquement par les femmes. On peut être un homme et féministe ce n’est pas complétement incompatible. En tant qu’homme, on doit montrer que ce n’est pas un comportement normal et que c’est horrible. Je suis un homme féministe, c’est possible.
CM: Un petit message pour nos lecteurs ?
PA: Gardons espoir. Il faut qu’on préserve notre identité parce qu’elle est super belle et on doit être fière de ce qu’on représente. On doit s’entraider au maximum, c’est ça qui nous différencie d’autres cultures et d’autres peuples, on peut parfois être un peu individualiste, mais il y a pleins d’autres exemples qui montrent qu’on peut s’en sortir quand on se donne la main et qu’on avance ensemble. Croyons en nous et fonçons !
Un grand merci à Pedro Alves pour son honnêteté et sa bienveillance au cours de l’entretien.
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